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FR : Interview de Flo : Responsable du Pôle Lectra dans une maison de grande renommée

  • Photo du rédacteur: Mathilde Aubry
    Mathilde Aubry
  • 5 mars
  • 6 min de lecture

Ce portrait retrace le parcours d'une responsable du Pôle Lectra dans une maison de grande renommée. Forte de 36 ans d’expérience dans le domaine de la couture, elle supervise la réalisation des patronages et des fiches techniques. Son témoignage illustre la parfaite alliance entre savoir-faire traditionnel et outils digitaux, tout en mettant en lumière les défis liés à la transmission des compétences techniques dans un secteur en constante évolution.

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"Je m'appelle Flo et je travaille actuellement dans un service de patronage dans une maison de couture. Je supervise la réalisation de patronages et de fiches techniques. Mon parcours débute avec une formation classique de type bac, suivie d'un BTS en matériaux souples, et un CAP de couture en parallèle.

Depuis mon enfance, j’ai toujours été passionnée par la couture. Je créais des collections complètes (vêtements de jour, robes cocktail, robes du soir) que je faisais défiler sur des petites poupées, imaginant ainsi de nouveaux modèles. Je réalisais moi-même les patronages et la fabrication des vêtements et accessoires, et j'ai même participé à des concours comme ceux organisés par "Modes et Travaux". J'aimais me donner des défis, tels une grande créatrice de mode.

Pour arrondir mes fins de mois, j’effectuais des retouches de robes pour des clientes fortunées, ce qui m’a permis d’acquérir des connaissances sur les finitions des pièces de grands couturiers tels que Lanvin, Balmain, Yves-Saint-Laurent et Hermès. Ce métier me passionnait, notamment le travail des matières et des finitions, et j'aimais mettre en valeur les étoffes à l’aide de thermocollants, en fonction des modèles que l’on me présentait.

Mes débuts se sont faits en tant que patronnière dans une jeune société, où j’ai appris à réaliser des patronages pour hommes et femmes, notamment pour des vêtements techniques et confortables. C’était une expérience intéressante qui m’a permis de découvrir la fabrication avec des techniques tel que le soudage et l’utilisations des machines à double entrainement.

Par la suite, j’ai intégré une maison de couture en tant que patronnière manuelle, où j’ai appris à travailler avec des outils traditionnels tels que les règles, les équerres et le crayon, tout en réalisant des fiches techniques à l’encre de Chine. J’ai également réalisé des gradations à la main et commencé à utiliser un logiciel pour digitaliser et ajuster les patronages. Ce logiciel nous permettait de produire des patronages de haute qualité, en y ajoutant des détails comme les surpiqûres, les arrêts de poche, des motifs de broderie tout en incluant des croquis pour une précision optimale et d’autres éléments techniques.

L'arrivée des produits Lectra et du logiciel Modaris a marqué un tournant dans ma carrière, permettant de digitaliser directement les patronages. Dès cet instant, l’évolution rapide des logiciels et la liaison avec les fabricants a révolutionné la production (Les fabricants ne digitalisaient plus et ont commencé à récupérer la gradation). Nos façonniers en Chine, au Japon et en France utilisaient des logiciels différents, ce qui obligeait les équipes à redigitaliser les plans à chaque étape. Cela a créé un besoin urgent d'unifier les outils de production.

Pour exercer à merveille notre métier nous nous devons de collaborer avec les modélistes. Ce sont les modélistes qui nous transmettent soit la toile, soit le patronage.  Nous digitalisons les morceaux et réglons le patronage jusqu’à ce qu'il soit parfait. Ensuite, nous imprimons sur papier pour contrôler que le patronage sera fonctionnel, qu’il s’ajuste tel un puzzle. Lorsque l’on est satisfait, nous leur transmettons le patronage afin qu’ils puissent faire une dernière vérification. S’il n’y a pas de retouches nécessaires, le modéliste nous donne son accord. C’est à ce moment-là que l’on passe au lancement.

« Le lancement » est un processus qui consiste à créer une fiche de nomenclature regroupant tous les éléments qui constituent un vêtement.  C’est un document complet avec tous les éléments du modèle, comme le tissu, la doublure, les boutons, les étiquettes, etc.. Cela permet à tous de travailler à partir d’un document mère. Nous y mettons aussi les métrages nécessaires pour le placement des tissus, ce processus assure que tout soit conforme avant de passer à l’étape suivante. Grâce à cette fiche, nous pouvons donner une estimation du coût de réalisation du modèle détaillé. 

Une fois que nomenclature est complétée, nous donnons à la coupe les placements (tissus, doublure et thermocollants… ). Quand tout est coupé, le coupeur crée une « bûche », avec toutes les fournitures nécessaires pour la fabrication du modèle avec l’aide de la fiche technique et nomenclature.

L’étape suivante se déroule à l’atelier, où la pièce est assemblée par un mécanicien modèle. Tout est noté dans la fiche, par exemple, pour le thermocollant, ce qui permet d’ajuster l’épaisseur du tissu et de garantir l’effet escompté. C’est une tâche minutieuse qui doit être suivie avec soin à chaque étape, ce qui nécessite une communication idéale entre les différents services, une bonne gestion des patronages avec les façonniers est essentielle pour que les modèles correspondent exactement aux attentes, tout comme l’ajustement du produit avec la cohérence du patronage et de la fiche technique est primordiale. 

Une bonne gestion des patronages avec les façonniers est essentielle pour que les modèles correspondent exactement aux attentes. 

L’importance de connaître le montage d’un vêtement est primordiale. Cela permet de comprendre comment les pièces s'assemblent et d'éviter de commettre des erreurs de conception. Les patronages sont pour la conception de vêtement ce que les plans sont pour la conception d’une structure architecturale. Il est donc nécessaire d’anticiper les différents aléas lors de la conception d’une pièce.

Aujourd’hui ce qui me semble le plus compliqué dans mon travail c’est le recrutement de patronniers maîtrisant à la fois les techniques informatiques et manuelles, car ces profils sont rares sur le marché. Les profils les plus jeunes, eux, ont souvent des bases solides en informatique, mais manquent de compétences pratiques et manuelles. Cela m'amène à prendre des jeunes qui peuvent avoir du potentiel dans cette filière, mais il est certain qu’il est difficile de transmettre son savoir avec pédagogie. Afin d’évaluer leur pugnacité et leur créativité j’aime leur demander s’ils ont l’habitude de confectionner des vêtements pour eux-mêmes ou pour leur proche, et s’ils peuvent me les présenter avec leur portfolio par exemple. 

Aujourd’hui, de nombreux jeunes se dirigent vers des carrières de stylistes ou de modélistes, mais peu s’intéressent aux métiers techniques comme la coupe, le montage, ou le travail avec le système Lectra. C’est un véritable défi de les attirer et de leur montrer l’importance de ces métiers. Mais il y a toujours des exceptions : récemment, une jeune femme que j’ai recrutée et qui a suivi des études de stylisme, a préférée se diriger dans ce métier technique qu’est le patronage.

L’équipe Lectra a un travail varié en fonction du Pôle Flou et Pôle Tailleur selon les besoins, en fonction des collections et de la complexité des modèles. Les pièces plus complexes, comme les robes de soirée ou les pièces VIP, demandent beaucoup de temps et d'attention. Pour certaines robes de soirée cela peut prendre près de 30 heures de réalisation, avec des tâches détaillées comme la pose des baleines ou les indications spécifiques sur les coutures et les broderies...

Dans notre domaine, une nouvelle tendance émerge : l’intégration de la 3D. Il est donc essentiel de maitriser le montage, car d’un point de vue informatique, il est crucial de comprendre comment recréer un vêtement, connaitre son patronage et savoir comment il a été conçu afin de garantir un résultat optimal une fois le vêtement finalisé et remonté. Ensuite les vêtements sont placés sur un avatar, et dès qu’il y a des ombres sur le vêtement, cela permet d’identifier les zones nécessitant des retouches.

Cette méthode présente des avantages si la structure le permet et si cela n’entraîne pas trop de temps, car elle peut remplacer le montage d’une toile pour un essayage sur un mannequin. Bien que le visuel du tombé du tissu soit irremplaçable.

Cependant, il est essentiel de maitriser la 3D, en s’appuyant sur le système CLO 3D, (liaison avec Modaris) pour garantir l’efficacité du processus."


Ce témoignage met en lumière l’importance cruciale d’allier techniques traditionnelles et outils digitaux dans la confection des vêtements. Grâce à un parcours alliant formation théorique et pratique sur le terrain, il apparaît que la maîtrise du montage d’un vêtement est essentielle pour garantir la qualité et la fiabilité des créations. Malgré les défis liés au recrutement et à la formation des jeunes talents dans des métiers techniques souvent délaissés, ce récit souligne la nécessité de préserver et transmettre ces savoir-faire pour assurer l’avenir de la haute couture.

 
 
 

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